Covid-19 et collectivités #2 : La stratégie financière dans l’urgence

Ci-dessous le premier article de notre série sur les conséquences de la crise sanitaire pour les collectivités.

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Un fonctionnement budgétaire transitoire

La loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 adoptée le 22 mars et l’ordonnance relative aux mesures de continuité budgétaire, financière et fiscale des collectivités territoriales et des établissements publics locaux prévoient plusieurs assouplissements pour permettre de fonctionner dans la période actuelle, notamment :

  • La date limite de vote des comptes administratifs et des budgets est reportée au 31/7 ;
  • Dans l’intervalle, des mesures de souplesse sont accordées, en particulier les possibilités de mouvements de crédits de chapitre à chapitre sans nécessité de vote, à l’exclusion des dépenses de personnel et dans la limite de 15% des dépenses réelles de chaque section. Cette mesure concerne à la fois les montants issus des budgets 2019 pour les collectivités n’ayant pas encore adopté leur budget, et les crédits 2020 pour certaines collectivités ayant adopté leur budget (les régions, les métropoles, la collectivité territoriale de Corse et les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique ;
  • La date limite de vote des taux est repoussée au 3 juillet, et plusieurs décisions en matière de tarifs/fiscalité sont reportées à septembre ou octobre ;
  • Les délégations en matière d’emprunt restent valables jusqu’à la première réunion du conseil.

 

Ces mesures permettent de continuer à fonctionner d’un point de vue budgétaire. L’un des enjeux de l’année 2020 sera néanmoins, pour chaque collectivité, d’assurer l’équilibre budgétaire en fonction des baisses de recettes (tarification des activités, droits de mutation, etc.) et la hausse de certaines dépenses (mesures de soutien, etc.).

 

De la visibilité sur vos liquidités

Alors que certaines recettes vont se tarir, les collectivités vont faire face au maintien de la plupart des dépenses (masse salariale, fournisseurs, remboursement de la dette…). La liquidité importante dont elles disposaient en début d’année pourrait ainsi fondre rapidement chez certaines d’entre elles.

Les collectivités pourront mettre en regard les liquidités disponibles et rapidement mobilisables avec leur plan prévisionnel de trésorerie. Elles pourront pratiquer des stress tests sur celui-ci afin de mesurer sa sensibilité et anticiper des situations dégradées. Le plan de trésorerie sera à remettre à jour quotidiennement en fonction de l’évolution constatée des dépenses.

La collectivité pourra ainsi arbitrer sur les éventuels instruments de financement court terme à contractualiser. L’ordonnance relative aux mesures de continuité budgétaire, financière et fiscale des collectivités territoriales prolonge les délégations en matière de recours à l’emprunt. Par ailleurs, les établissements bancaires proposent en réponse à la crise des outils de trésorerie qui peuvent se révéler utiles pour faire face à des urgences.

 

Sensibiliser les banques sur vos éventuels besoins de financements

Les banques sont actuellement focalisées sur la mise en œuvre du plan de 300 Md€ de prêts garantis par l’Etat. Ce dispositif, destiné aux entreprises, ne concerne pas les collectivités locales (sauf exception : EPL par exemple). Par conséquent, les équipes des établissements de crédit traitent en priorité les dossiers urgents provenant des entreprises.

Les collectivités en situation de financement tendue devront donc solliciter les banques rapidement en communiquant clairement sur leur besoin rapide de fonds. Les demandes de financements de précaution ne seront pas prioritaires.

 

Le risque relatif à la dette garantie

La crise économique à venir fragilise de nombreuses structures qui peuvent bénéficier de garanties de la part des collectivités. La suspension des loyers des TPE et PME auprès de certains bailleurs, la baisse de la solvabilité des particuliers devraient se traduire par une baisse sensible des recettes des acteurs immobiliers et notamment de ceux du logement social.

Une revue de la situation des bénéficiaires de garantie permettra à la collectivité d’évaluer le risque d’appel en garantie sur les prochaines échéances bancaires.

 

Le risque de renfort des satellites

Avec les mesures de confinement liées à l’épidémie, les organismes associés des collectivités, et notamment les associations, sont confrontés à de grandes difficultés : perte de revenus, opérations ou évènements annulés, adaptation du travail, hausse des dépenses (aide aux sans-abri, portage de repas notamment).

L’Etat a mis en place des mesures d’urgence pour aider les entreprises et associations avec des reports d’échéances fiscales et sociales et des garanties bancaires, mais il est fort probable que ces mesures ne soient pas suffisantes. Ainsi les collectivités devraient être très rapidement amenées à soutenir financièrement leurs associations via des mesures d’accélération de versement de subventions, d’augmentation du montant des volumes ou encore des soutiens en trésorerie.

A plus long terme, les collectivités pourraient aussi être appelées à couvrir des pertes financières, en tout ou partie, sur certains organismes associés. Un suivi des organismes associés pourra être réalisé afin d’avoir une vision claire sur les risques encourus (notamment liés aux participations en capital) et les anticiper.